• Tw avortement.

    Je continue de penser à mon enfant. Je n'ai pas le droit de dire ça, parce que ce n'était même pas un enfant, en fait. C'était un embryon, deux cellules fusionnées... Alors je ne dois pas dire que c'était mon enfant, mais quand même. Quand même iel était dans mon ventre. Je l'aurais appelé.e Swann, parce que c'est joli et c'est neutre. Je l'aurais serré.e dans mes bras. Je pense à mon enfant, et iel me manque. Tout ce qu'iel avait à vivre je l'en ai privé. 

    Mais qu'est-ce que j'aurais pu faire d'autre ? On ne devient pas mère à treize ans. En tout cas, moi je ne pouvais pas, je n'étais pas prête. Et qui sait, Swann aurait peut-être ressemblé à son père. Je ne l'aurais pas supporté, ça non plus. Le souvenir de ce hall d'immeuble, de ce qui s'y est passé, de mes larmes aussi. Est-ce que j'aurais pu aimer mon enfant dans ces circonstances ? J'aurais quand même voulu qu'on m'accompagne. Qu'on m'aide. Avorter, puisque c'est bien ce que j'ai fait, c'est difficile, et personne ne le fait par plaisir. Alors, j'aurais voulu que les infirmières m'écoutent et me soutiennent au lieu de me juger... Et j'aurais voulu qu'on me dise qu'il me fallait une personne majeure avec moi, comme la loi l'oblige, au lieu de me laisser seule et de fermer les yeux. 

    Moi, je serais toujours pro-choix, parce que je n'aurais pas tenu avec un bébé. Et la culpabilité, je ne la souhaite à personne. C'est idiot de savoir que je ne suis pas coupable, et de quand même m'en vouloir autant. Mais cet enfant, je l'aime, même s'il n'est pas là, même s'il n'a jamais vraiment été là, qu'il n'a pas été ni un enfant ni un humain, j'y pense et j'ai mal. J'ai supprimé toutes ses perspectives d'avenir. Je n'aurais pas su m'en occuper, vous comprenez ? Je n'aurais pas pu, même en faisant de mon mieux, je ne savais déjà pas m'occuper de moi-même... Comment accompagner quelqu'un à vivre quand soi-même on ne pense qu'à mourir ? 

    Swann, j'espère qu'on se retrouvera dans une autre vie, que tu comprends... J'espère que tu ne me hais pas, que tu sais que j'ai fait de mon mieux, même si c'était dur. Je t'aime. Je t'aime comme je n'ai jamais aimé personne, comme je n'aimerais plus jamais. Tu seras toujours dans mes pensées, et à chaque nouvelle découverte, je me demande si tu aurais aimé. Je me demande toujours quelle voie aurait été la tienne, la couleur de tes yeux, le son de ta voix. Je t'aime plus que l'amour.


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